Vivre dans une maison qui consomme très peu d’énergie : voilà le rêve derrière le concept de la maison passive. Ce type d’habitation, encore marginal au Québec, attire de plus en plus de curieux.
Deux questions reviennent fréquemment :
- Est-ce réellement une avenue réaliste dans notre climat nordique ?
- Est-ce qu’il faut être fortuné pour être propriétaire d’une maison passive?
Qu’est-ce qu’une maison passive ?
Avant de répondre à ces deux questions, penchons-nous sur les particularités de ce type de propriété.
Une maison passive (ou Passivhaus, selon la certification d’origine allemande) est conçue pour minimiser les besoins en chauffage et en climatisation. Grâce à une isolation exceptionnelle, une étanchéité à l’air quasi parfaite et une ventilation mécanique efficace avec récupération de chaleur, elle maintient une température intérieure stable toute l’année.
En hiver :
Le soleil, les occupants et les appareils électroménagers suffisent souvent à chauffer la maison ! L’objectif : réduire jusqu’à 90 % la consommation énergétique comparativement à une maison conventionnelle.
En été :
- Le positionnement des fenêtres de la maison est primordial : elles sont placées vers le sud pour minimiser l’apport de chaleur en été (et le maximiser en hiver).
- Des auvents sont également installés aux fenêtres pour bloquer les rayons le jour, ainsi que des surplombs de toit (comme une corniche) et des pergolas à proximité de la propriété. Bref, des éléments structuraux pour apporter de l’ombre.
- Des arbres feuillus au sud, à l’est et à l’ouest du bâtiment sont plantés pour protéger la maison du soleil. Et l’endroit de plantation doit être pensé pour ne pas nuire à l’absorption des rayons de soleil par la maison en hiver.
- Une mécanique de ventilation est aussi adoptée par les occupants. Les nuits d’été, ils doivent ouvrir les fenêtres du rez-de-chaussée et au premier étage afin de créer une circulation d’air qui poussera l’air chaud de la maison à s’évacuer.
À noter que certaines maisons passives sont tout de même dotées d’un système de chauffage et de climatisation… au cas où!
Un concept adapté au climat québécois ?
C’est là que les choses se compliquent.
Le Québec, avec ses grands écarts de température, représente un vrai défi pour l’efficacité énergétique. Nos hivers rigoureux et nos étés parfois caniculaires mettent à rude épreuve même les meilleures constructions.
Cependant, plusieurs projets démontrent qu’il est possible d’adapter le concept aux réalités d’ici. Les architectes et constructeurs d’ici ont développé des approches hybrides (triple vitrage, encore plus d’isolation, etc.) ou encore ont ajouté des matériaux à forte inertie thermique dans la structure.
Des exemples concrets d’ici
Des maisons passives ont déjà vu le jour un peu partout dans la province, de Montréal à Gaspé. Par exemple :
- Maison Ozalée (Montréal)
- Probablement le projet le plus connu. Il s'agit d'une grande rénovation d’un bungalow des années 1950, qui est devenu la première résidence certifiée Passivhaus au Québec.
- Parmi les éléments notables : triple vitrage, murs très bien isolés, enceinte bien étanche, orientation soignée, récupération de chaleur, etc. Le projet vise aussi la certification LEED Platine en plus de la Passivhaus.
- Maison Passive: S (Nominingue)
- Cette maison unifamiliale de trois chambres est construite pour profiter d'une vue sur le lac Nominingue. Elle inclut notamment une grande fenestration au sud, des protections solaires (pergolas, balcon), murs à double ossature et isolation à base de cellulose, en plus de panneaux en fibre de bois.
- Projet Norra Hem (Tremblant)
- Il s’agit d’un projet en cours (une maison passive ou bâtiment à très faible consommation) sur le versant nord de Tremblant. Le plan d’étage est inversé (chambres au rez-de-jardin, espaces de vie plus haut) pour optimiser le terrain qui est en pente. Il y a de grandes ouvertures stratégiques pour maximiser la lumière et les apports solaires malgré les contraintes de site.
- Maison Passive Saltbox (Bromont)
- Cette propriété est un beau mélange entre architecture traditionnelle et performance énergétique élevée. Le projet utilise des matériaux durables et vise un niveau de confort accru avec une enveloppe bien isolée ainsi que des systèmes performants.
Les autres avantages
Outre son efficacité énergétique, la maison passive offre :
- Un confort thermique incomparable : pas de courants d’air ni de zones froides.
- Un air plus sain grâce à la ventilation constante qui filtre poussières, pollens et humidité.
- Une valeur de revente accrue (notamment en raison des factures d’Hydro-Québec presque inexistantes et l’aspect écologique de la bâtisse)
Un défi financier et une planification ardue
Tout n’est pas parfait, bien sûr.
Le prix initial demeure l’un des principaux freins. L’isolation performante, les fenêtres spécialisées et la main-d’œuvre qualifiée coûtent cher. Et pour obtenir la certification officielle Passivhaus, il faut respecter des critères techniques stricts et faire appel à des experts.
Autre défi : la planification minutieuse. Une erreur de conception (mauvaise orientation, pont thermique mal pensé, ventilation mal calibrée, etc.) peut compromettre l’efficacité énergétique globale. On ne construit pas une maison passive à la légère : chaque détail compte, du choix du terrain à l’installation des portes.
Une tendance qui prend de l’ampleur
Qu’à cela ne tienne! Les gouvernements et municipalités s’y intéressent de plus en plus, notamment par le biais de programmes d’efficacité énergétique et d’incitatifs financiers. Certains promoteurs québécois misent même sur des quartiers entiers inspirés du modèle passif dans un avenir rapproché.
De plus, la sensibilisation environnementale grandissante pousse de jeunes acheteurs à vouloir investir dans des habitations durables plutôt que dans des maisons énergivores.
Alors, la maison passive est-elle un rêve ou une réalité? Il y a dix ans, l’idée semblait utopique. Aujourd’hui, elle est beaucoup plus tangible!

